Index ELECTRE


la femme de chagrin





Fille d'Agamemnon et de Clytemnestre, Electre est inconnue d'Homère et ne semble pas avoir joué un rôle très important dans la mythologie archaïque. Pourtant, au Ve siècle av. J.-C. elle devint un des personnages les plus importants du drame des Atrides. Dans les Choéphores d'Eschyle, elle était l'un des personnages prépondérants. Avec l'Electre de Sophocle et celle d'Euripide, elle prend clairement le premier rôle et devient celle qui manipule la vengeance.

Electre Jeune fille elle assiste au meurtre de son père et c'est elle qui sauve des mains d'Egisthe son jeune frère, Oreste, en l'écartant d'Argos en secret. Fidèle à la mémoire du roi mort, son père, elle n'hésite pas à entrer en conflit ouvert avec les souverains et à en subir les conséquences. Prisonnière de sa propre maison, condamnée à ne jamais connaître les joies de l'amour et du mariage, ou exilée dans la hutte d'un pauvre paysan, qu'elle est obligée de suivre dans un mariage mal assorti et humiliant qui ne sera jamais consommé, Electre a pour unique espoir le retour d'Oreste et la vengeance. Et quand Oreste revient, c'est Electre qui, comme une Furie vengeresse, arme sa main et galvanise son courage pour qu'il tue Egisthe, l'ennemi et l'usurpateur, ainsi que leur propre mère.

Vouée à la mort, noyée dans le chagrin, Electre vit sans vivre, sans la joie d'amour, sans accomplir le destin de sa nature, consacrée à la vengeance. Aux antipodes de la femme Clytemnestre se tient la vierge Electre. L'une et l'autre sont dures et implacables -'Mon cœur est un loup affamé, hérité de ma mère' - mais la première est la personnification d'un modèle clairement négatif, tandis que la seconde représente un modèle plus positif, du moins pour la période à laquelle les tragédies ont été écrites.

Electre Car avec sa foi aveugle en son père, qui la conduit à renier complètement sa mère, Electre donne à la vision patriarcale des rapports humains son expression la plus claire. C'est la même vision qui dicte les paroles d'Athena et Apollon dans les Euménides d'Eschyle, quand ils absolvent Oreste de la culpabilité du meurtre de sa mère.

    Ce n'est pas la mère qui engendre celui qu'on nomme son enfant : elle n'est que la nourrice du germe qu'elle a conçu. Celui qui engendre, c'est le mâle ; elle, comme une étrangère, conserve la jeune pousse, quand un dieu n'y porte pas atteinte. Et je vais te donner une preuve de ce que j'avance : c'est qu'on peut devenir père sans l'aide d'une mère, témoin la déesse ici présente, la fille de Zeus Olympien, qui n'a pas été nourrie dans les ténèbres d'un sein maternel, et c'est pourtant un rejeton tel qu'aucune déesse n'en saurait enfanter.

    Eschyle Les Euménides 659-665
    (Trad. Emile Chambry)

 

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© MINISTÈRE GREC DE LA CULTURE - ICOM - COMITÉ NATIONAL HELLENIQUE
De Medée à Sapho - Femmes rebelles de la Grèce Antique
Athènes, Musée Archéologique National - 20 Mars - 30 Juin 1995